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Comment la réglementation liée à la COVID-19 modifie la dynamique locataire-propriétaire

Des règlements adoptés à la hâte pour répondre à une pandémie qui évolue rapidement ont ajouté un degré de complexité aux baux entre locataires et propriétaires.

30 septembre 2020

Les gouvernements du monde entier ont mis en place différentes politiques fiscales et juridiques d’urgence pour atténuer les dommages économiques causés par les restrictions de voyage et les mesures de confinement liées à la COVID-19. Chaque pays a établi ses propres règles, créant ainsi une multitude de politiques sur le retour au travail, l’aide financière au loyer et les codes de conduite sur l’indulgence relative aux paiements , et a facilité l’accès des locataires ou des propriétaires aux subventions et aux prêts du gouvernement.

« Plusieurs de ces politiques ont trait à une aide fiscale directe ou à une suspension réglementaire de leurs exigences juridiques courantes entourant la relation locataire-propriétaire », déclare Jeremy Kelly, directeur de la recherche mondiale, JLL.

À Singapour, par exemple, le gouvernement a accordé des abattements fiscaux et des subventions en espèces aux propriétaires dont les PME locataires avaient connu une baisse de plus de 35 % de leurs revenus bruts d’avril à juin. Au Royaume-Uni, les entreprises des secteurs du commerce de détail, de l’hôtellerie et des loisirs peuvent recevoir une subvention en espèces de 25 000 £ (32 000 $) par propriété. En Australie, les propriétaires ont droit à une réduction de 25 % de la taxe foncière pour 2019-2020, pourvu qu’elle soit transmise aux locataires. Dans l’ensemble des pays développés, des moratoires sur la confiscation de baux commerciaux par les propriétaires pour non-paiement du loyer sont également courants.

« Bon nombre de ces mesures accommodent les locataires. Compte tenu des conditions souples du marché actuel, les locataires ont un meilleur pouvoir de négociation sur plusieurs marchés », déclare M. Kelly.

Cette situation a soulevé certaines préoccupations à propos des propriétaires. Les diverses mesures adoptées pour aider les entreprises en cette période de crise ont créé des problèmes. Par exemple, elles sont souvent axées sur l’aide financière directe aux locataires ou une restriction des mesures exécutoires du propriétaire pour recouvrer le loyer.

Risque de répercussions involontaires

« Bien que certains pays, comme l’Australie, les Pays-Bas et Singapour, aient mis en œuvre des plans pour aider les propriétaires, d’autres régions ont établi des mesures qui n’offrent aucune aide comparable aux propriétaires, souligne M. Kelly. Jusqu’à présent, on a constaté une distinction importante entre les pays : leur reconnaissance ou non du fait que la propriété fait partie d’un système social et économique plus grand. »

« Dans les économies avancées, les promoteurs immobiliers et les propriétaires ne sont pas seulement une source de revenus fiscaux pour le gouvernement, mais ils sont aussi des investisseurs dans les infrastructures et les services locaux, et des fournisseurs de prestations de retraite et d’emplois. Par conséquent, les conséquences financières involontaires sur les propriétaires risquent d’avoir des répercussions très variées sur les communautés locales, les entreprises et l’économie dans son ensemble », précise M. Kelly.

Néanmoins, les démarches législatives des gouvernements pour atténuer les répercussions liées à la COVID-19 ont introduit de l’incertitude dans les relations de location. Certains propriétaires ont choisi de fournir, pour une durée déterminée, des congés de paiement à leurs locataires. Certains examinent la possibilité d’établir des calendriers de remboursement pour le reste du bail, alors que d’autres ont libéré le locataire de ses obligations locatives, particulièrement pour les petits locataires.

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« Ces changements juridiques ont nécessité des négociations sur la façon de rembourser les obligations locatives qui s’accumulent durant les périodes de moratoire, souligne M. Kelly. Les négociations dépendent de la situation de chaque propriétaire et locataire. Les propriétaires tentent d’atteindre l’équilibre entre le maintien de leurs revenus et l’aide à leurs locataires pendant la crise afin de conserver les taux d’occupation et les revenus à long terme », poursuit-il.

L’immobilier dans l’économie en général

« Pendant que de nombreux pays peinent à contenir la COVID-19, l’échelle et l’envergure des changements apportés aux baux ne sont pas tout à fait déterminées. Cette incertitude soulève des questions sur la structure des nouveaux baux », souligne M. Kelly.

Par exemple, cette situation a mis en lumière le concept des baux basés sur le chiffre d’affaires, selon lequel les locataires versent un loyer minimum garanti et inférieur, ainsi qu’une partie de leur chiffre d’affaires, pour que le rendement des détaillants corresponde mieux aux niveaux de location. Ce type de bail est actuellement étudié au Royaume-Uni, où il était auparavant rare.

« Les pays de common law peuvent aussi éprouver des difficultés à établir une jurisprudence assez rapidement pour composer avec la crise, affirme M. Kelly. Cependant, dans les pays dotés de systèmes réglementaires et juridiques solides, les droits des locataires et des propriétaires sont traditionnellement bien équilibrés », ajoute-t-il. Au fil des décennies, ces pays ont appris que lorsque la réglementation favorise trop les droits des locataires ou des propriétaires, le système ne fonctionne pas aussi bien.

« Dans les cas où les locataires peuvent résilier leur bail sans obligation de réparation au propriétaire, il est plus difficile ou pratiquement impossible d’utiliser la propriété à revenu comme garantie pour un prêt. À l’inverse, lorsque les propriétaires tirent parti des pouvoirs de monopole conférés par les contraintes d’offre ou permettent leur renforcement, les économies et les locataires locaux en souffrent, explique M. Kelly.

À court terme, les systèmes juridiques et les relations locataire-propriétaire devraient être mis à l’épreuve. »

« La majorité des interventions réglementaires liées à l’immobilier ont été conçues à titre de mesures d’urgence. Bien que leurs répercussions soient durables, le retour aux normes antérieures et la gestion de ce processus seront importants », déclare M. Kelly.

« Au cours des derniers mois, certains pays ont établi, pour faciliter la gestion de cette relation, des codes de conduite sur les baux commerciaux qui sont obligatoires, comme en Australie, ou sur une base volontaire, comme au Royaume-Uni. Cependant, il sera crucial de comprendre l’équilibre des responsabilités et l’importance de fournir une aide structurée aux locataires et aux propriétaires pendant cette période, surtout si les effets économiques de la pandémie durent plus longtemps que prévu au départ », affirme M. Kelly.

« Bien que des mesures à court terme aient mis en lumière les préoccupations à traiter concernant la structure des baux post-COVID, tout contrat éventuel devra être bien dosé pour les propriétaires et les locataires, afin d’assurer la viabilité du secteur immobilier », ajoute-t-il.

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Contact Jeremy Kelly

Director of JLL Global Research

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